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Dans la cour d'école

Violences passées sous silence

Le mal invisible

Psychoéducatrice de formation, Marie-Sol Caron a réalisé son mémoire de maîtrise à la Faculté d'éducation de l'UdeS. Celui-ci est intitulé Enquête sur l'intimidation directe et indirecte dans les écoles primaires : Qu'en savons-nous et que faisons-nous pour contrer ces formes de violence? Son but professionnel : intervenir auprès des écoles afin de les sensibiliser à la réalité des agressions indirectes.
Psychoéducatrice de formation, Marie-Sol Caron a réalisé son mémoire de maîtrise à la Faculté d'éducation de l'UdeS. Celui-ci est intitulé Enquête sur l'intimidation directe et indirecte dans les écoles primaires : Qu'en savons-nous et que faisons-nous pour contrer ces formes de violence? Son but professionnel : intervenir auprès des écoles afin de les sensibiliser à la réalité des agressions indirectes.

La psychoéducatrice Marie-Sol Caron en a déjà fait l'expérience à l'école primaire où elle travaillait. «L'ensei­gnante ne pouvait plus enseigner, se souvient-elle. Des messages écrits au sujet d'une fillette circulaient conti­nuellement. Ils étaient rédigés à son insu et ils visaient clairement à la ridi­culiser. Ils occupaient toute l'attention des élèves, c'était le chaos. Tout le monde en a souffert.» Marie-Sol a dû intervenir de façon ferme : des règles visant spécifiquement les agressions indirectes?1 ont été appliquées dans cette classe de sixième année. La directrice s'est impliquée dans la résolution du problème et les parents ont été sensibilisés.

Comme le scorpion, «l'agresseur indirect» reste dans l'ombre et isole sa proie sans l'affronter. Le plus souvent, il agit en dehors des salles de classe : dans les corridors, la cour de récréation, les toilettes ou l'autobus. L'agresseur brime les relations de sa victime et son sentiment d'appartenance sociale par toutes sortes de moyens hypocrites : raconter des ragots, ridiculiser la personne dans son dos ou l'ignorer volontairement, comme ça a été le cas pour Geneviève Martel. «Pendant toute une année, je me suis sentie isolée, plaide Geneviève. La manipu­lation et la méchanceté larvée de cette fille, à qui je n'avais rien fait, m'ont laissé, au bout du compte, un souvenir cuisant. Encore aujourd'hui, je n'ai aucune idée de ce qui l'a poussée à me traiter de la sorte.»

De manière générale, les filles et les garçons adoptent des conduites violentes dans des proportions semblables. Par ailleurs, selon une enquête de l'Organisation mondiale de la santé, 17 % des élèves canadiens rapportent avoir été victimes d'intimidation au moins deux fois au cours de la dernière semaine. Toutefois, alors que les garçons sont plus concernés par les agressions physiques, des recherches suggèrent que les filles commettraient davantage d'agressions dites indirectes. Cette différence entre les sexes serait plus marquée lors de la période qui marque le passage à l'adolescence.

Qu'est-ce qui motive les «agresseurs indirects»? Il semble, selon certains chercheurs, que ces comportements soient reliés au besoin de s'adapter à son milieu ou au désir d'être accepté par son groupe d'amis?2.

Certaines données recueillies auprès de jeunes adolescentes australiennes indiquent que les filles ont recours à l'agression indirecte par jalousie, pour se venger de quelqu'un, pour lui voler un ami ou pour se mettre en valeur. Les filles utiliseraient également cette forme de violence simplement pour se désen­nuyer, pour créer une source d'exci­tation dans le groupe ou pour suivre un leader?3.

Dans certains cas, ceux qui se livrent à de telles agressions manifesteraient davantage de troubles de comportement, dont la sévérité atteint parfois le seuil clinique?4. Par ailleurs, un nombre considérable de cas de dépression serait observé chez les victimes d'agression indirecte; celles-ci semblent avoir une faible estime d'elles-mêmes et se croient souvent responsables de ce qui leur arrive, et ce, peu importe qu'il s'agisse de garçons ou de filles?5.

1 Crick, N.R. et Grotpeter, J.K. (1995); Ostrov, J.M. et Keating, C.F. (2004); Zimmer-Gembeck, M., Geiger, T.C. et Crick, N.R. (2005); Xie, H., Farmer, T.W. et Cairns, B.D. (2003).

2 Verlaan, P., Déry, M., Toupin, J. et Pauzé, R. (sous presse); Wolke, D., Woods, S., Bloomfield, L. et Karstadt, L. (2000).

3 Owens, L., Slee, P. et Shute, R. (2000).

4 Achenbach, T. (1991).

5 Crick, N.R., Grotpeter, J.K. et Bigbee, M.A. (2002), Ladd, B.K. et Ladd, G.W. (2001).